Texte de Adrien Martel (retrouvez le sur Twitter : @tweetklash)
Temps de lecture estimé 5 mn
Dans le dernier épisode, Atari a essayé de prendre sa part du gâteau en piratant Nintendo avec une manoeuvre à la fois culottée et chanceuse.
Mais c'est Nintendo qui édicte les règles maintenant et ils ne l'entendent pas de cette oreille...
IV- La victoire dans la rue
1- Chantage(s)
En 1989, Atari assigne Nintendo en justice pour “entrave à la libre concurrence” et réclame dix millions de dollars de dommages et intérêts. Le japonais prend alors la mesure de ce qui se passe derrière son dos, et va réagir comme elle l’a toujours fait, par la voix de ses commerciaux sur le terrain.
Le discours véhiculé à l’époque à tous les revendeurs est alors on ne peut plus clair : “Si nous retrouvons une seule cartouche non licenciée NSQ sur vos étales, soyez sûrs que nous ne vous approvisionnerons plus en produits Nintendo”.
Sur un marché où la plupart des revendeurs sont encore des artisans et les boutiques des petites entreprises familiales, vendre des produits Tengen piratés revient alors à tuer la poule aux œufs d’or. Quelques mois à peine après la vague des produits illégaux d’Atari, il devient presque impossible d’en trouver sur le marché du neuf.
Assuré de la sauvegarde de son système, le nippon réunit alors les preuves du scandale (à peine caché) créé par Atari, et se présente devant la cour avec un dossier à charge.
2- Censé, mais malhonnête
C’est en substance ce que délibèrera la cour à propos des accusations d’Atari. Si le postulat d’entrave à la concurrence est pour la justice américaine justifié et vérifiable, elle estime à la grande surprise de l’entrepreneur américain que le piratage des cartouches, ainsi que la violation d’un copyright par tromperie constitue une atteinte bien plus grave au marché ainsi qu’aux intérêts de l’accusé.
Blanchi mais sommé de clarifier son système de label, Nintendo se verra même octroyer une somme considérable, sous la forme d’une amende infligée à Atari.
3- Quand Dieu s'en mêle, le hacking par la foi
Comme tous les codes, celui de la puce 10-NES sera cracké, presque dix ans après sa création, par un jeune homme sur lequel peu d’informations ont jamais filtré. Ainsi, en 1995, une obscure société nommée Wisdom Tree commence à distribuer -à une échelle certes confidentielle- des jeux piratés aux titres évocateurs... Bible Adventure, Sunday Funday sont des exemples de titres qui se révèleront être... des jeux inspirés de la Bible.
La première réaction de Nintendo face à la vente de ces jeux sera de tenter de les interdire, ainsi que de poursuivre Wisdom Tree. Cependant, les temps ont changé et le nippon a d’autres priorités.
À l’aube d’une nouvelle génération de consoles, mais surtout dans un contexte où le jeu vidéo commence à être diabolisé, la firme estimera finalement que la perte est négligeable au vu du gain potentiel d’image qu’elle pourrait en retirer. Elle laissera faire, et les petites cartouches bleues se distribueront par milliers à travers les États-Unis. Amen.
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Durant les années 80 et pendant presque une décennie ensuite, le jeu vidéo restera un no man’s land ou les manœuvres les plus sombres seront le prix à payer pour s’imposer. Alors que le fait de jouer n’est une idée acquise pour personne, il revient à chaque éditeur de convaincre que son produit a un potentiel et un avenir.
Malgré un engouement quasiment sans faille du consommateur américain, ce sont les autorités et les investisseurs qui seront les plus durs en affaires, estimant que si une entreprise du cru (Atari) avait échoué, le concept devait être à bout de souffle. Bien loin du jeu vidéo contemporain, qui se fond et valse avec le cinéma et les autres médias, posséder une console à la fin des eighties relève encore souvent de l’incongruité.
Ce manque de reconnaissance entraînera un vide juridique dans lequel Atari n’a pas été le seul à s’engouffrer. D’autres procès retentissants marqueront l’histoire du jeu de salon, souvent face à des juges désarmés et dépassés par les enjeux et les technologies avancées. Mais ceci est une autre histoire...
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L'auteur
Adrien, correspondant de presse et rédacteur
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